Au cas où vous ne l’auriez pas entendu, RJ Hampshire a vécu un week-end des plus mouvementés lors de la finale du Monster Energy AMA Supercross à Salt Lake City. Après un mauvais départ, il a remonté le peloton et s’est retrouvé dans la roue arrière de son rival pour le titre, Seth Hammaker (à noter que ce dernier était alors en pleine bagarre avec Tom Vialle et Julien Beaumer, ce qui le ralentissait). Confronté à une décision difficile, Hampshire a laissé parler son instinct de champion… et a tenté le tout pour le tout. Malheureusement pour lui et Hammaker, les deux pilotes sont tombés, offrant le titre à Tom Vialle. Nous avons échangé cette semaine avec RJ pour connaître ses impressions sur ce moment clé et sur la course en général.
Avant de revenir sur l’incident avec Seth Hammaker, raconte-nous ta course avant ce moment-là. Tu as pris un mauvais départ mais tu rattrapais énormément de temps. Tu étais dans un état d’esprit "tout ou rien" ? Qu’est-ce qui se passait dans ta tête ?
Ça a mal commencé avec ma manche qualificative. J’ai eu un gros crash et la journée ne se passait vraiment pas bien. Mais une chose que je n’ai jamais perdue, c’est la foi en mes chances de décrocher ce titre. J’avais une 19e position sur la grille, complètement à l’extérieur. Il restait quatre grilles libres et l’une d’entre elles était bien meilleure. Jack Chambers, qui choisissait juste avant moi, m’a demandé si je voulais sa place. C’était vraiment classe de sa part, il n’avait aucune raison de me la céder.
Au départ, j’étais autour de la 15e position et j’ai commencé à remonter. C’est la meilleure sensation que j’ai eue sur une finale cette saison. Je voyais où étaient les gars et je savais où je devais être. Je continuais à gratter place après place, et je voyais que j’allais avoir une opportunité.
C’était dingue de te voir remonter comme ça. Avec ce mauvais départ, on s’est dit : "C’est fini pour RJ." Puis quelques minutes après : "Ah non, il est dans le coup !"
(Rires) Ouais, ça résume bien ma saison. "Il est dehors… Ah non, il revient… Mince, il ressort… Ah non, le voilà de nouveau !" C’était exactement ça pendant la finale. J’ai pris pas mal de risques dans les enchaînements. Les gars que je doublais ne passaient pas les mêmes sections que les pilotes de tête. Sur les deux ou trois premiers tours, j’ai eu des frayeurs, mais je savais que je devais tenter ces coups pour garder une chance.
Et puis arrive ce fameux dépassement sur Hammaker… Tu en as parlé sur Instagram en disant que c’était une décision que tu aurais préféré ne pas avoir à prendre. Raconte-nous ce qui s’est passé dans ta tête à ce moment-là.
Tous les pilotes qui ont déjà été dans cette situation savent ce que j’ai ressenti. J’avais doublé 12 ou 13 gars pour en arriver là et j’avais bien observé ce qu’il se passait devant. J’ai fait un dépassement agressif et on est tous les deux tombés. Mais avant ça, vous avez vu les quatre pilotes qui se rentraient dedans deux tours avant ? La seule différence, c’est que nous, on est tombés. Beaucoup ont fait des moves aussi risqués, mais le mien n’a pas fonctionné.
Tout est allé très vite. J’ai doublé JuJu (Beaumer) deux virages avant, j’ai eu une meilleure sortie des whoops que Seth, je suis arrivé à l’extérieur. Je n’avais même pas prévu d’attaquer à ce moment-là, je venais juste de le rattraper. Il ne s’attendait pas à me voir là. Et puis, il a laissé l’intérieur ouvert et j’ai saisi l’opportunité. N’importe qui prétendrait faire ce qu’il faut pour un titre… Eh bien, moi je l’ai fait. J’assume totalement. Le résultat est terrible, et je suis désolé pour mon équipe, pour Seth et pour Mitch Payton et son équipe. Mais je ne m’excuserai pas d’avoir tenté le coup.
Et tu savais que le timing était serré.
Oui, il ne restait que trois tours. Si j’attends encore un tour, il protège toutes ses trajectoires intérieures et il ne laisse plus aucune ouverture. Ou bien si je fais comme JuJu et les autres qui le gênaient après le triple, tout ce que ça aurait fait, c’est le ralentir et il se serait calé derrière moi… et ça n’aurait pas suffi pour le championnat.
C’est toujours plus simple de refaire le match après coup…
Exactement. Je me suis senti mal, et qui ne le serait pas ? Je ne voulais même pas sortir du camion après ça. Je suis resté avec mes gars un moment. Et puis je me suis dit que je devais aller voir Mitch, par respect. C’est quelqu’un que j’ai toujours admiré. Alors j’y suis allé, j’ai été honnête et je me suis excusé pour le résultat. Mais je lui ai aussi dit : "Si c’était ton pilote dans cette situation, tu aurais voulu qu’il tente." Au début, ça ne s’est pas très bien passé, ce que je comprenais tout à fait. J’avais fait perdre le championnat à son équipe. Mais en lui expliquant que je devais non seulement passer Seth, mais qu’il fallait aussi qu’un autre pilote se glisse entre nous pour remporter le titre, je crois qu’il a mieux compris. Je ne pense pas qu’il ait accepté mes excuses pour autant, mais j’espère qu’avec le temps on pourra apaiser ça. Pareil avec Seth, je n’ai pas cherché à lui parler ce soir-là parce que je comprends que je sois la dernière personne à qui il avait envie de parler. Peut-être qu’un jour, on pourra en discuter et qu’il comprendra mon choix.
Après la course, Seth disait qu’il ne comprenait pas pourquoi tu avais tenté ça alors qu’il restait encore un peu de temps.
Oui, il ne s’y attendait pas. Mais il ne restait que trois tours. Et si j’attends encore, il ferme toutes les portes et je n’aurais plus d’ouverture. Je devais tenter le coup tant qu’il y avait une opportunité.
Au final, la saison a été folle, et le public en a eu pour son argent.
C’est clair. Toute mon année a été dingue. Il y a eu tellement de moments où je pensais que c’était terminé. Mais à chaque fois, j’avais une nouvelle chance. Pareil dans cette finale. Les deux gars pour le titre étaient partis en 2e et 3e position, et j’ai réussi à les rattraper. C’est entièrement ma faute, mais honnêtement, je n’aurais jamais dû me retrouver en position de tenter ce dépassement. Je suis parti 14e ou 15e. Ma finale a été sauvage du début à la fin.
Je suis désolé pour le résultat. Pour mon équipe, pour Mitch et pour Seth. Mais je ne m’excuserai jamais d’avoir tenté ma chance. Tout vrai pilote comprendra ce choix. J’ai dû faire une pause sur les réseaux ces derniers jours parce que ça commençait à sérieusement me chauffer. Je suis déjà à bloc pour passer en 450 d’ici quelques semaines. J’espère que ça va me pousser à vivre un été de folie et tourner la page de cette carrière en 250.